Des essais de couvert permanent en bio encourageants
Arvalis a imaginé une technique innovante de semis sous couvert de luzerne en agriculture biologique. Si les premiers résultats sont concluants, il reste néanmoins des verrous.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
Dans le projet Graal (1), Arvalis essaie une nouvelle approche pour gérer un couvert permanent avec un travail du sol limité et sans recours aux herbicides. Celle-ci est possible grâce à un outil, développé en collaboration avec la société Eco-mulch, qui fauche l’interrang de la culture principale, guidé par RTK.
Plusieurs plantes de service testées
Concrètement, une plante de service, en l’occurrence de la luzerne, est semée en ligne à 30 cm d’écartement. Ces lignes sont géolocalisées par le système de guidage du tracteur. À l’automne, la culture de rente, un blé par exemple, est implantée entre les rangs de luzerne, à 30 cm également. Blé et couvert sont ainsi espacés de 15 cm.
« Nous avons testé plusieurs plantes de service, comme le sainfoin ou le trèfle violet, mais l’espèce la plus adaptée reste la luzerne, indique Régis Hélias, d’Arvalis. Il faut une plante non traçante, pour se donner les moyens de la contrôler. On s’interdit par exemple le trèfle blanc qui drageonne et occupe l’espace rapidement. »
Flux continu d’azote
La luzerne est broyée juste après le semis du blé, et sa biomasse produite durant l’été est restituée au sol. « En se dégradant, elle crée un flux continu d’azote pour alimenter la culture suivante », indique Régis Hélias. La légumineuse est en repos végétatif pendant l’hiver, laissant la place au blé pour taller.
Au printemps, la luzerne est fauchée deux ou trois fois avec la faucheuse à interrangs, jusqu’à ce que le blé soit suffisamment haut pour lui faire de l’ombre et la concurrencer. En retrouvant la lumière après la moisson de la céréale, la légumineuse reprend sa croissance et exerce une pression sur les adventices. Si la luzerne passe au-dessus du blé, la méthode de fauchage-andainage peut s’envisager à la récolte.
Les essais montrent une baisse de rendement de la céréale lors de la première année de luzerne. « L’azote du sol est alors partagé entre les deux espèces », justifie Régis Hélias. En deuxième année, le rendement retrouve un niveau normal en bio, et il est déplafonné l’année suivante.
Raisonner différemment la rotation
Dans sa première année d’essai, Arvalis a implanté une orge brassicole. Associée à la luzerne, son rendement s’est élevé à 27 q/ha, contre 40 q/ha cultivée seule. Le pool d’azote qui s’installe dans la parcelle conduit à raisonner différemment la rotation : d’abord implanter des cultures faiblement exigeantes en azote, puis intégrer des cultures plus demandeuses. Pour la récolte de 2024, Arvalis cultivera un blé tendre, puis un blé dur l’année suivante.
« D’un point de vue réglementaire vis-à-vis du cahier des charges bio, dans ce système-là, on peut faire un blé sur blé sans restriction de durée, car la parcelle est considérée comme une culture associée », indique Régis Hélias. Arvalis n’a par ailleurs pas observé une pression maladie supérieure, malgré la succession blé sur blé. Régis Hélias encourage cependant à ne pas généraliser cette technique sur l’intégralité de l’exploitation, au cas où un problème surviendrait sur la luzerne.
Pour l’ingénieur, si cette technique fonctionne d’un point de vue agronomique, il est encore trop tôt pour qu’elle se déploie chez les agriculteurs. « L’exigence de précision et de rigueur dans les agroéquipements pose un problème, indique Régis Hélias. Les niveaux de précisions des tracteurs ne sont pas toujours comme annoncé, et il faut aussi que l’outil derrière soit parfaitement centré et aligné. »
(1) projet Casdar.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :